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Pétillant comme Voltaire, romanesque comme Balzac…

portrait de Balzac
Pour fêter mon dernier roman, vous me mettrez une centaine d'huîtres arrosées de Champagne, puis quelques côtelettes, canetons et perdreaux... Et envoyez donc la note à mon éditeur !

Le Champagne, c’est 4 776 récoltants, 66 coopératives, 293 négociants, 33 344 hectares de Pinot noir (39 %), Meunier (32 %) et Chardonnay (29 %), une récolte, en 2010, équivalente à 315 millions de bouteilles, 1 384 millions de bouteilles en stock, …

Le Champagne, comme vous le savez, c’est un vin de fête, léger, aérien… presque mythique. C’est aussi le vin le plus cité dans la littérature française, quel que soit le siècle ou même l’époque. Petit tour chez Voltaire, Balzac, et Colette.

Dans « Le Mondain », écrit en 1736, Voltaire aime le luxe, les plaisirs de la table et de la conversation, et y célèbre les vertus de cette boisson magique, que l’on savoure après une sortie au théâtre ou à l’opéra, et qui fait déjà, la fierté de l’Hexagone…

« Il faut se rendre à ce palais magique
Où les beaux vers, la danse et la musique,
L’art de tromper les yeux par les couleurs,
L’art plus heureux de séduire les cœurs,
De cent plaisirs font un plaisir unique.
Il va siffler quelque opéra nouveau,
Ou, malgré lui, court admirer Rameau.
Allons souper.
Que ces brillants services,
Que ces ragoûts ont pour moi de délices !
Qu’un cuisinier est un mortel divin !
Chloris, Eglé, me versant de leur main
D’un vin d’Aï dont la mousse pressée,
De la bouteille avec force élancée,
Comme un éclair fait voler le bouchon ;
Il part, on rit ; il frappe le plafond.
De ce vin frais l’écume pétillante
De nos Français est l’image brillante.
Le lendemain donne d’autres désirs,
D’autres soupers et de nouveaux plaisirs. »

Si l’on parcourt l’oeuvre d’Honoré de Balzac, on y trouve trois fois plus d’occurrences du mot « champagne » que du mot « bordeaux », et environ treize fois plus que du mot « bourgogne ». Dans cet univers, le champagne est lié à la fête. Il délie les langues, fait tourner les têtes. On le boit souvent avec des huîtres.

« Taillefer se piqua d’animer ses convives, et fit avancer les terribles vins du Rhône, le chaud Tokay, le vieux Roussillon capiteux. Déchaînés comme les chevaux d’une malle-poste qui part d’un relais, ces hommes fouettés par les flammèches du vin de Champagne impatiemment attendu, mais abondamment versé, laissèrent alors galoper leur esprit dans le vide de ces raisonnements que personne n’écoute, se mirent à raconter ces histoires qui n’ont pas d’auditeur, recommencèrent cent fois ces interpellations qui restent sans réponse. L’orgie seule déploya sa grande voix, sa voix composée de cent clameurs confuses qui grossissent comme les crescendo de Rossini. Puis arrivèrent les toasts insidieux, les forfanteries, les défis. » (La peau de chagrin)

Dans « Histoire de ma vie », recueil épistolaire autobiographique, George Sand témoigne des accords mets-vins quelque peu surprenants de Balzac :

« Un soir que nous avions dîné chez Balzac d’une manière étrange, je crois que cela se composait de boeuf bouilli, d’un melon et de champagne frappé, il alla endosser une belle robe de chambre toute neuve, pour nous la montrer avec une joie de petite fille, et voulut sortir ainsi costumé, un bougeoir à la main, pour nous reconduire jusqu’à la grille du Luxembourg. »

A suivre, la semaine prochaine, Colette et le vin d’or.

Sophie Surrullo