Avec la Winista, ils inventent le vin en capsules !
Outre Atlantique, au pays de Barefoot wines et de Coravin, les innovations marketing s’enchaînent pour bousculer le Mondovino. Dernier projet à voir le jour, lancé par une jeune start-up de jeunes cadres de l’agroalimentaire, le vin en capsules ! Avec Winista, et la possibilité de servir du vin au verre à partir de simples capsules de vins déshydratés, l’équipe de Pimp My Wine (génial comme nom de compagnie !) veut faciliter l’approche du vin, de façon décomplexée. Du vin en capsules ? Wine else ?
C’est dans la banlieue de Palo Alto, que la petite équipe menée par Marvin vient de mettre au point, après deux ans de recherche, la première machine à servir du vin en capsules. La Winista (c’est son nom) sorte de Nespresso du vin, permet de servir des grands vins au verre, à la bonne température, à partir d’extraits déshydratés. J’ai eu vent de cette innovation par mon ami Jean, et j’ai pu les rencontrer à Bordeaux, à l’occasion de la semaine des Grands Crus, où ils sont venus trouver des partenaires.
La révolution, l’alcool en poudre
Comme me le rappelle Kevin, l’oenologue de l’équipe, formé à l’université du vin de Californie : « le vin, c’est 85 % d’eau, environ 14 % d’alcool, et puis tout le reste… ». « Finalement le goût et la qualité du vin, c’est seulement un minuscule 1 % de la composition totale » ajoute-t-il non sans malice.
Donc, en réduisant le vin à sa quintessence, on gagne 99 % de poids et de volume ; on augmente en plus la durée de vie théorique du vin indéfiniment, en bloquant tout risque d’oxydation. Jusqu’à présent, on peut facilement enlever l’alcool du vin, pour produire du vin sans alcool par exemple. Il suffit de filtrer le vin sur des membranes très fines (on appelle ça une filtration tangentielle), de combiner à une technique d’osmose inverse. En théorie, ce système permet de déshydrater le vin, car les molécules d’eau, plus petites que les molécules d’alcool, sont aussi filtrées par ce système avant d’être réincorporées dans le vin. On peut donc aisément obtenir du vin en poudre, constitué des extraits secs.
D’ailleurs, le vin en poudre déshydraté existe, le problème rencontré jusqu’à présent, c’est qu’il était mauvais, et sans alcool… l’astuce de nos start-upers, c’est d’avoir pu rencontrer Mark Phillips, un investisseur américain un peu fou qui a créé Palcohol, la première société distribuant (légalement), de l’alcool en poudre. L’innovation est assez ancienne, datant des années 70, mais prend vraiment son sens avec l’idée des petits gars de Pimp my Wine… Donc la recette est simple, une capsule d’extrait sec de vin, additionnée de la bonne dose d’alcool en poudre et conditionnée en capsules hydrophobes… Restait à trouver le système pour les réhydrater facilement et préserver l’équilibre du vin, ce qu’ont réussi Kevin et Marvin, un de ses associés.
La Winista, la Nespresso du vin
Marvin nous présente le prototype de la Winista, prêt à être produite en série. Le principe est simple, on met la capsule dans la machine, qui est reconnue grâce à une puce Rfid, et l’eau est ajoutée au travers de la capsule, à la bonne quantité, à la bonne température avec également une phase d’oxygénation (pour « ouvrir les arômes », comme nous précise Davina, l’aromaticienne de l’équipe). Difficile de ne pas résister à l’enthousiasme de Kevin, « En une pression sur un bouton, vous pouvez vous servir le verre de vin que vous désirez ! ».
Restait à conclure des partenariats avec les vignobles prestigieux pour attirer les consommateurs exigeants que sont les Millenials américains. Grâce à un accord avec un expert européen du vin, le sommelier franco-belge Jean Moulard, l’équipe de Pimp my Wine a pu se faire ouvrir les grilles plaquées or des grands châteaux de Bordeaux. C’était un peu l’idée de Kevin au départ : « on s’est aperçu que vous faites du bon vin en France, mais que vous êtes incapables de bien le vendre, franchement, le marketing, c’est pas votre truc… » me soutient-il lors de notre rencontre. « Regardez le Sauternes, par exemple, un super produit, un vin qui peut plaire à toute la jeunesse hype de la côte est, chez nous, car c’est doré, bling bling, sucré, facile à boire… Mais vous vendez ça dans des bouteilles à la papa avec des étiquettes gaufrées horribles ! Personne ne veut consommer un produit qui vous fait passer pour un plouc ».
Des Grands Vins en capsules
Heureusement, dans cette région, certains domaines sont ouverts aux idées nouvelles du marketing, comme le So Sauternes, un Sauternes avec du Perrier. C’est pour cela que Pimp my Wine a déjà sécurisé un accord avec un grand château pour produire le premier Sauternes en capsules. Comme le monde de Bordeaux est assez suiveur, d’autres grands châteaux qui vendent leur vin très cher, à destination des nouveaux riches Chinois et Russes, ont rapidement manifesté leur intérêt. La gamme devrait s’étoffer et offrir rapidement des Saint Emilion Grands Crus Classés et autres Grands vins de Bordeaux. Pourquoi Bordeaux ? « Et bien, avec Jean (Jean Moulard, ndr), on s’est dit qu’il fallait frapper vite et fort » raconte Marvin, « Il nous fallait des brands, de l’image, de la provocation, et le bordelais est la meilleure appellation pour faire ça ». Et pourquoi pas la Champagne ? Un problème pour déshydrater les bulles m’a-t-on répondu…
La start-up va bientôt lancer sa machine avec une gamme de 5 vins de Bordeaux (un Sauternes, un Bordeaux rosé, un Pessac-Léognan blanc, un Saint Emilion et un Pauillac pour les rouges). Le marché ciblé est d’abord celui de la côte Est des Etats-Unis. Mais vu l’ingéniosité de Pimp My Wine, ils devraient élargir rapidement leur marché, au rythme des autorisations administratives de commercialisation de l’alcool en poudre, un vrai frein selon eux.
Ils projettent d’ailleurs de lancer très prochainement un Kick Starter, avec comme ambition de faire la plus grosse levée de fonds du secteur du vin. A suivre sur leur page Facebook !