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Concours de vins : dix ans de médailles, des logiques différentes

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Les militaires chinois, c’est comme les bouteilles de vins. C’est au nombre de médailles que l’on estime leur ancienneté (.DR)

Le mois de février fut la saison des médailles. A  Soochee, Sochi, Sotchi,  bref, à Сочи évidemment, où les athlètes français en ont remporté 15 à la force du jarret, mais également au salon international de l’agriculture, où vaches, poulets, camemberts fermiers et vins de toutes les appellations s’affrontaient dans une lutte à mort pour gagner le précieux macaron. 

Pour en revenir à nos bouteilles de vins, avec 70.000 vignerons français, dont 20.000 environ qui mettent en bouteille, 750 caves coopératives et quelques centaines de maisons de négoce, le nombre de cuvées produites par an est immense. Les médailles et concours tentent donc d’apporter une certaine visibilité au vigneron, et une aide au choix pour les consommateurs. Les grands principes de fonctionnement des concours ont déjà été abordés (faudrait que je renouvelle mes blagues par ailleurs, quand j’y repense…). Mais la saison faisant le larron, voici une petite comparaison de l’évolution de la répartition du nombre de médailles depuis 10 ans pour trois concours sérieux dont on dispose des données en ligne sur la période.

Tout d’abord, le succès de ces évènements est palpable, puisque le nombre d’échantillons présentés augmente régulièrement, tout comme le nombre de médailles (proportionnel rappelons-le au nombre d’échantillons présentés). Ainsi, en dix ans le nombre de médailles (donc d’échantillons présentés) a augmenté de 60 % pour le concours des vignerons indépendants, de 50 % pour celui du concours général agricole. Celui des Vinalies, plus confidentiel (mais non moins sérieux), reste constant… Pourtant sur la même période le nombre d’exploitations viticoles a chuté de près de 30 %.

Trois concours, trois évolutions et philosophies différentes dans l’attribution des médailles. Au Concours général agricole, la tendance est à diminuer progressivement le nombre de médailles de bronze, qui, il est vrai, peinent à convaincre les consommateurs dans les rayons de supermarché. En effet, la médaille de bronze est un peu vue comme un prix de consolation, du style : »bien mais peut mieux faire »… Quitte à récompenser, autant donner une véritable médaille qui va permettre de vendre, et pas une médaille en chocolat. L’Or domine donc est augmente au cours du temps. La présence de nombreux producteurs comme jurés sur le concours (beaucoup plus que pour les Vignerons indépendants ou les Vinalies par exemple) influence probablement cette évolution, par effet de corps.

Le concours des Vignerons indépendants est quant à lui plus semblable aux règles des Jeux Olympiques : Un tiers de médailles d’Or, un tiers de médailles d’argent et un tiers de médailles de Bronze, en guise de tendance. D’expérience, les médailles de bronze sont souvent décernées aux échantillons qui laissent les dégustateurs en désaccord : certains aiment le vin, les autres le trouve sans intérêt. La présence de consommateurs en proportion assez importante donne peut-être plus de diversité dans les avis affichés.

Au concours des Vinalies enfin, règne désormais la froide et implacable règle du 50 % de médailles de Bronze, 35 % de médailles d’Argent, 15 % de médailles d’Or. Place au mérite donc. Les vins médaillés sont bons, mais seuls les vins très bons et excellents aux yeux des jurés bénéficient des plus hautes distinctions. C’est un concours plus méritocratique, les jurés sont aussi exclusivement experts, ce qui joue certainement sur la façon de noter.

Quelle meilleure méthode pour médailler les vins ? Difficile à dire : l’objectif est double, et contradictoire par certains côtés : il faut informer le consommateur, et lui garantir qu’un vin médaillé sera meilleur qu’un vin non médaillé. Choisir l’excellence parait donc judicieux… Or, pour que les médailles aient du sens, il convient d’avoir un grand nombre de participants, afin d’être certain de couvrir une grande partie de la gamme des vins destinés bien souvent à être vendus en grande surface, là où le consommateur est privé de tout repère. Or, les concours ne sont pas obligatoires, et les vignerons sont libres, ou pas d’y participer. Noter de façon trop stricte décourage les vignerons qui ont tendance à ne plus participer… Noter de façon trop généreuse dilue les médaille, et ne rend plus service au consommateur. Choix cornélien donc.